Best treehouse ever

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Hop, un nouvel article comme si de rien n’était. Les diverses déforestations constantes, les augmentations drastiques du prix du mètre carré et la bien mauvaise idée de se mettre en tête de protéger nos petits chérubins irresponsables empêchent ceux-ci de réaliser les vieux fantasmes rustiques véhiculés par la pop culture américaine.  Prenons donc les cartes, à défaut de prendre les armes ou les outils, et attelons nous à la création de la Meilleure cabane dans les arbres de tous les temps.

Best treehouse ever est un jeu de cartes familial américain pour 2 à 4 joueurs kickstarté en 2015 par l’éditeur green couch, que l’on connait vaguement par ici grâce au brièvement mentionné Jurassattack. C’est en vérité le nom du designer du jeu qui devrait nous rappeler quelque chose car Scott Almes a bossé sur quasiment tous les Tiny epic machin-trucs.

C’est sans surprise vers le bas de la page du financement participatif de BTE ( et non pas BTS ou BMT) que l’on retrouve le manuel et les fichiers d’impression de sa V1, une version déjà bien rodée fort agréable à jouer. Les règles ne font que quelques pages et sont en anglais simple (le jeu est très accessible et repose sur quelques concepts aussi intuitifs que faciles à mémoriser). Il y aura ensuite 11 pages de cartes de taille standard à découper. Il est tout à fait possible d’imprimer tout ça à 75% dans l’objectif de réduire l’espace que prendra ensuite le jeu une fois déployé sur la table.

Les versos, disponibles dans un fichier à part, ne sont absolument pas nécessaires. Ils mettront à mal votre cartouche de bleu mais apporteront une finition très agréable au projet. Il est important d’imprimer le jeu en couleurs ou de le colorier soi-même, sans quoi sa lisibilité explosera un peu en miette. Une grande partie de son charme réside dans les forêts infiniment colorées qu’il génère mais la couleur sera surtout impérative au bon déroulé visuel des parties. Le jeu a bien prévu des icônes utiles aux daltonien·ne·s mais celles-ci sont minuscules et se reposer uniquement sur ces éléments fera grandement perdre en fluidité autant qu’en délectation.  Cette nécessité vient surtout de l’état incomplet des illustrations, proposées pour moitié en brouillon dans le cadre de ce PNP. Deux pions de couleur similaire seront enfin requis par protagoniste de la partie. 

Chaque joueur et joueuse prend possession d’un tronc qui servira de base à sa cabane, y place un jeton de sa couleur tout en laissant le second près de la carte commune de score. Tout le monde pioche 6 cartes dans un deck d’une septantaine de pièces de cabane puis en choisit une. Les cartes ainsi sélectionnées sont révélées en même temps puis positionnées simultanément sur le tronc. On fait ensuite passer son paquet au joueur ou à la joueuse à sa gauche et le processus recommence. La manche se conclut lorsque environ toutes les cartes sont ainsi disposées et un décompte de point se déclenche. La partie se termine au bout de la troisième manche.

À cette simplicité apparente viennent s’accoler quelques notions supplémentaires. Les cartes pièces de cabane se déclinent en 6 couleurs. Hormis lors de la pose de la première carte d’une couleur, chaque pièce doit être connectée à une carte de la même couleur (chaque pièce rouge doit être reliée à une autre pièce rouge, par exemple). Si c’est impossible, la carte est défaussée,. Ce sont des points irrémédiablement perdus.  De plus, l’arbre tend à tanguer et poser une carte le fera pencher d’un coté ou de l’autre de son axe vertical. Entre alors en jeu le pion placé originellement sur le tronc. La pose d’une carte décale ce pion d’un cran en sa direction. La prochaine carte devra dès lors se déployer dans un espace disponible qui rééquilibre l’arbre ou sera défaussée elle aussi.

Pour couronner le tout, on marque des points trois fois durant la partie. Les cartes s’accumulant sur l’arbre, il faudra prendre soit de gérer les avancées de couleurs trop poussives car les adversaires pourront impacter tout excès qui leur serait désavantageux. Chaque carte posée dans un arbre vaut de base 1 point à chaque décompte. Un·e par un·e, chaque joueur et joueuse choisira un modificateur de score puis l’accolera à une couleur, modifiant sa valeur pour tout le monde lors du décompte de cette manche passée. Une famille de carte pourra alors voir sa valeur doubler (2pts par carte), rester la même (1pt par carte) ou disparaitre (0pt par carte). Les modificateurs sont évacués une fois le score calculé et il faudra les sélectionner de nouveau à la fin de la manche suivante.

Partage des mains piochées (draft / pick-n-pass), règles de pose un minimum contraignantes et discrètes stratégies de gain de points se mélangent pour former un jeu qui n’aura pas l’intensité d’un classique absolu du genre comme 7 wonders mais qui permettra de passer un bon moment à une table qui recherche un jeu de société moderne sans s’y perdre totalement.

On trouve une couche de réflexion inattendue dans le choix des modificateurs de points de victoire. Outre le multiplicateur et le bloqueur, options souvent bien évidentes, il faut aussi prendre en compte en cours de manche sa propre place dans l’ordre d’attribution et de pose des modificateurs. En gardant en tête, par exemple, la possibilité de poser son multiplicateur en premier, on sait pouvoir valoriser sa meilleure couleur. À l’inverse, poser son multiplicateur après quelqu’un de véhément sur les annulations de couleur obligera à changer de couleur dominante. Enfin, savoir qu’un voisin valorisera une couleur spécifique devrait aussi faire dévier la gamme chromatique d’une canopée.

Le jeu se joue idéalement à 3 joueurs et joueuses, ce qui permet de pouvoir espérer voir revenir certaines cartes et d’imaginer ses stratégies en fonction de sa main de départ. À 4 joueurs, les chances de retrouver une carte désirée sont trop maigres. Le bordel se fait un peu plus sentir et les possibilités de prévisions se restreignent. À deux jours, les cartes font d’incessants allers-retours et le contre-draft fait réellement son apparition mais les phases de comptabilisation de points manquent de saveur. Il faut jouer bien plus à l’équilibre, de façon à ce qu’un mauvais coup de l’adversaire implique de l’impacter de manière assez équivalente.

Verdict stratégique rapide: il faut s’assurer de l’existence de deux grandes couleurs dominantes permettant de capitaliser à la fois sur les modificateurs de fin de manche mais aussi des fabuleux points bonus de fin de partie, aptes à renverser d’une traite un potentiel équilibre précaire sur la piste de score. Il ne faut toutefois pas que ces couleurs soient prépondérantes trop tôt dans la partie sous peine de sanctions quasi systématiques.  Le contre-draft n’est pas vraiment efficace dans ce style d’objet ludique désinvolte. C’est l’étude des stratégies adverses dans le but de conserver des cartes utiles qui prévaut sur de vaines tentatives de bloquer l’adversaire (blocage généralement assez inefficace et peu pertinent dans son propre arrangement).

Bien que les détails des pièces empilées sur l’arbre tendent à se flouter, l’effet du déploiement de la ramure des arbres reste superbe. La mécanique de rééquilibrage constant du tronc est très intéressante et créera des obligations à prendre en compte attentivement. Best treehouse ever est cependant un jeu résolument familial qui ne prend pas le chou mais propose quelques petites options sympathiques toutes en légèreté. Avec 39 pages de commentaires sur boardgamegeek, BTE est définitivement apprécié mais de ceux qui acceptent ou s’attendent à sa relative simplicité.

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