Titre alternatif envisagé: Extreme Maximum Apocalypse of the total Armageddon.
Je ne suis pas très zombie, ou du moins je ne le suis plus. La réalité a dépassé la fiction qui s’est elle même diluée dans trop d’itérations. Il faut pourtant avouer que d’un panorama si foisonnant nait fatalement d’agréables expériences ludiques. Plus personne ne réinvente la roue (qui tourne parfois trop librement) mais cette biodiversité mort-vivante forcenée ne peut amener qu’à la découverte ponctuelle de fonctionnements intéressants, parfois relativement nouveaux, parfois simplement efficaces. Maximum apocalypse propose divers types d’invasion, invalidant immédiatement et naturellement la critique du manque de renouvellement thématique valable pour la plupart des jeux de zombies qui, avouons le d’entrée de jeu, auraient très bien pu remplacer les cadavres putréfiés par moult autres menaces plus inattendues. Ce premier point positif n’est pas spécifiquement exaltant lorsqu’on compare le jeux à d’autres coopératifs survivalistes qui se sont effectivement extraits de ces poncifs mais il renforce dors et déjà mon argument clef: Maximum Apocalypse est fort plaisant de tous les cotés.

Avec une appellation pareille, Maximum apocalypse est définitivement un titre à prononcer avec l’emphase d’une grosse voix viriliste digne d’un générique explosif de film d’action américain des années 90. C’est obligatoire,indispensable; mon incitation est péremptoire. Pourtant son système n’est pas spécialement munis des gros sabots habituels. Disons plutôt que le jeu se balade en pantoufles, dans les charentaises confortables de l’exploration de tuiles en milieu infesté. Pour manquer de filer la métaphore, le plaisir qu’on en retire repose principalement sur le ronronnement d’un moteur ludique bien rodé, d’une recette bien équilibrée, saine, bonne pour la santé. Overdose d’allégories mais qui donne le ton. Les points forts du jeux ne seront pas une surprise, ses points faibles non plus.
Ma conclusion est-elle en préambule ? L’article est-il dans un désordre total ? Oui. Et sur ce, le matos.
Maximum apocalypse se joue avec des cartes, des tuiles et des pions. Pléthore de cartes et de pions selon les manifestants, pas tant que ça selon la police. À ces quelques 300 éléments se rajoutent quand même quelques dés lambda partiellement remplaçables. Les fichiers du jeu, en anglais et très mal agencés par l’éditeur, sont disponibles sur itch.io à, une fois n’est pas coutume, 1 gros dollar. Quand je dis mal agencés, je veux en vérité dire imaginés avec les pieds car entre le manque de dos de certaines cartes, les fichiers en double, les fichiers artscow inutilisables à la maison, les fichiers vaguement nommés et les recto-verso qui ne sont pas dans le bon sens, il faudra faire de la reconstitution archéologique avant de commencer véritablement. Le dossier est un puzzle en soi, une première étape proto-ludique qui dessert sacrément le projet dans son ensemble. Il faudra d’ailleurs porter une attention toute particulière au fichier des missions car les cartes du verso sont inversés par colonne. Les autres cartes (exploration, lieux et monstres) ne nécessitent pas spécialement de verso mais le confort de tri (mise en place, rangement) que ceux-ci confèrent est toutefois indéniable. Le livre de règles de Maximum apocalypse fait 28 pages qu’il est recommandé de réduire à 14 en favorisant une impression 2 en 1. En anglais sur itch.io, il en existe une version française non officielle, à récupérer sur boardgamegeek. Le print and play ne contient que la base du jeu, déjà très complète voir conséquente (zombies, robots, mutants et aliens). Il est possible d’acheter les extensions une par une mais sa quintessence suffira déjà à fournir un nombre potentiellement conséquent de parties.

On trouve trois types de cartes et un type de tuile dans Maximum apocalypse:
– les tuiles lieux, sur lesquelles apparaitrons les monstres et passeront les joueurs et joueuses. Celles-ci forment une grille modulable d’environ 5*5. Elles sont cachées tant que personne ne décide de les explorer. Sur chaque tuile, un lieu emblématique de l’apocalypse, une condition (parfois désavantageuse), un type de ressource récupérable et un chiffre dangereux qui, si il est roulé lors d’une étape postérieure, déclenchera l’arrivée de créatures ennemies.
– les cartes personnages et monstres sur lesquelles on retrouve leurs PV, leurs capacités et leur niveau d’attaque mais auxquelles je jouxte des cartes objets et des cartes actions affiliées à des entités particulières. Ces cartes identifient les joueurs et joueuses, caractérisent leurs possibilités et représentent les menaces qui apparaissent à mesure que l’exploration des tuiles se poursuit.
– les cartes fouille (scavenge) qui comprennent des objectifs de missions, des objets de soins, des embuscades et du matériel générique. Ces cartes sont divisées en trois piles aux spécificités marquées (répartition précises de certaines cartes) et sont reconstituées différemment en fonction des missions.

Les participant·e·s à la partie (entre 1 et 6 personnes) commencent systématiquement sur une tuile spéciale, le van, placé en périphérie du terrain constitué par les tuiles faces cachées. Il leur faut compléter les étapes d’une mission sélectionnée préalablement (trouver des objets précis, tuer un certain nombre d’ennemis, atteindre un endroit précis, etc), récupérer suffisament de cartes essence puis retourner au van pour d’enfuir vers une prochaine étape éventuelle. Le jeu est imaginé comme une campagne qu’on peut ne pas suivre rigoureusement. Chaque partie se tient en elle-même mais peut s’inclure dans un tout un peu plus narratif formé de taches de plus en plus ardues. Il est donc possible de progresser studieusement dans le jeu ou de choisir ponctuellement une difficulté spécifique qui sied au niveau des camarades de tablée.
À l’inverse, une partie de Maximum apocalypse se perd selon deux critères: en cas d’extermination totale des survivants et survivantes (maintenant ex-survivants, fatalement…) ou en cas d’épuisement de la réserve de monstre, qui implique un raz-de-marée de crocs infectés, de tentacules ou de fusils-lasers qui submergent les personnages.

Quelques étapes avant d’en arriver là:
Un tour de jeu se découpe en 4 sous-phases.
1/ Deux dés sont lancés. Des monstres apparaissent sur des tuiles déjà révélées dont le numéro correspond aux résultats. Petite génération spontanée aux relents de sueur froide et de gout de sang dans la bouche.
2/ Le baroudeur ou la baroudeuse dont c’est le tour pioche une carte liée à son personnage puis effectue strictement 4 actions parmi la liste qui suit : se déplacer orthogonalement d’une tuile, piocher une carte perso, jouer une carte de sa main (qui n’en contient que 10 max), activer une carte déjà en jeu, piocher une carte fouille. Il est bien sur possible de réitérer plusieurs fois une action. Quelques actions gratuites conditionnelles viennent parsemer le tout mais la base est la. Simple, efficace, support d’une prise en main fluide et somme toute relativement prenante à défaut d’être surprenante. C’est ici qu’on se coordonne et qu’on tache d’éviter ou d’eviscerer les menaces les plus pressantes qui ne manquent pas de s’interposer ou de s’amasser en périphérie du parcours jusqu’au débordement fatal.
3/ Les démarches de survie conclues, le personnage gagne un niveau de faim. Si celui-ci dépasse son niveau de tolérance, des malus s’appliquent tandis que le personnage commencera à subir des dégâts inéluctables jusqu’à une mort annoncée. Les cartes nourritures disséminées dans les piles de fouilles sont à utiliser avec précaution. Elles sont les plus nécessaires lorsqu’elles peuvent aider le personnage à repasser sous la barre critique de souffrance intestinale (le niveau 6), arrêtant l’hémorragie de points de vie et remettant en ordre son compteur de famine au passage.
4/ Les monstres attaquent une fois ce petit détail gustatif réglé et ils font mal.

Tout ça serait trop simple sans quelques petites mécaniques supplémentaires saupoudrées de-ci de-là. Traverser une case remplie d’ennemi sans les affronter est possible à condition de réussir un jet de furtivité, tant que vous n’avez pas déjà aggro certains de leurs camarades. Le jet sera cependant plus difficile à mesure que vos nemesis s’amoncellent.
Certaines armes, certaines actions mais aussi certaines attaques adverses fonctionnent sur votre tuile, d’autres sur la votre et les adjacentes et les dernières sur deux cases à la ronde mais pas sur la votre. L’oublier est une erreur à ne jamais commettre.
Le jeu n’en reste pas moins très direct. Cette version ramassée de la majorité des jeux de zombie se finissant en cide tire en vérité son épingle du jeu grâce à cette condensation. Quelques piles de cartes et se crée l’impression de pouvoir partir faire les poubelles d’un monde en ruine en un instant, accompagné de n’importe qui. Quoi qu’assez marquées Amérique pure, les illustrations participent à une certaine immersion, en identifiant notamment au cas par cas les menaces qui s’acharnent à nous écharper. Sa difficulté n’est pas des plus atroces en début de parcours, permettant de s’y plonger avec d’autant plus de plaisir. La tension n’est toutefois pas absente des échappées peri-urbaines des arpenteurs de décombres car la faim et les ennemis aux effets spéciaux dévastateurs tendent à bien vite s’accumuler, s’avérant rapidement inévitables. Et puis les zombies ne sont visiblement que la première étape de la fin du monde. Le jeu, dans sa grande générosité, ne nous épargne visiblement aucune plaie dans un déferlement de violence qui ne semble ni vouloir se tarir ni baisser en intensité, pour preuve le fourmillement d’extensions, idéales pour qui considérerait le Maximum apocalypse initial comme trop basique. L’agréabilité d’être en terrain connu de l’exploration de l’inconnu se décline en fonction du public qui atteint le jeu: le soulagement de l’accessibilité ludique répond aux envies des vieux briscards pressés et des nouveaux joueurs et nouvelles joueuses submergées d’incitation tandis qu’explications et réflexes stratégiques s’enchainent avec fluidité.
Toujours dans un soucis de ne détruire les pupilles de personne, les images d’illustration de cet articles ont été piochées ici, et puis un peu là aussi. Crédits directement sous les photos. Image prédominante de Monkyky sur boardgamegeek.