Deux arguments en faveur des adaptations de jeux de société en application téléphonique:
– En cas de doute, l’appli évite les heures de sueur et de plaies au doigt pour un jeu qui ne nous plairait pas forcément (c’est donc le playtest ultime).
– On peut difficilement faire plus transportable.
Il existe de nombreux jeux de société gratuits disponibles sur téléphone (sans compter la pléthore de TGC/CCG). Certains sont des portages de jeux commercialisés, d’autre sont carrément des projets artisanaux dérivés de jeux qu’on peut encore imprimer librement. Il est parfois bien plus pratique d’y jouer sur écran, comme Castel builders et ses tout petits pions. Il est aussi parfois intéressant de découvrir comment certaines habitudes du jeu de société s’immiscent dans le divertissement digital. Voici donc un petit aperçu subjectif de titres agréables à jouer sur son téléphone (android), même si l’idée fondamentale de cette liste contrevient à l’épine dorsale manuelle de notre hobby.
Les PNP digitaux:
Oh my lair est un jeu solo d’allocation de dés minimaliste envers lequel je garde beaucoup de tendresse. J’en dis bien plus ici, inutile d’y revenir trop longtemps.
Marooned, exploration stratégique d’un plateau modulaire, a bien failli obtenir son propre article mais l’application m’a permis de déterminer que le jeu était bien trop aléatoire pour moi. Peut-être ne l’est-il pas pour vous. C’est en tout cas la preuve de l’utilité de tels portages.
Castle builders, duel de positionnement orthogonal, a aussi été mentionné il y a quelques temps, ici, avec contentement. Je m’en tiens à mon commentaire initial.
Escape of the dead, tentative de survie face à pléthore de zombies, est un jeu des créateurs de Oh my Lair. Je l’apprécie bien moins mais ne renie pas une petite partie de temps en temps au creux de la main.
Land 6 est un jeu de reconquête tendu. La version digitale automatise l’aléatoire de l’IA et évite d’alourdir le jeu par une multiplication de manipulations entre deux décisions. La version papier, au design un peu plus organique, est disponible ici.
Okyia a déjà été mentionné par ici. Rien ne dit que le jeu restera disponible indéfiniment en print and play (bien qu’il soit facile à recréer artisanalement). Un duel rapide et efficace, bien équilibré et idéal sur le pouce.
Hive est un jeu de plateau qui représente la quintessence de l’efficience de la sobriété en game design. Deux joueur·euses s’affrontent en disposant des pions-insectes les uns contre les autres puis en les déplaçant pour, selon les règles particulières au jeu, tenter d’obtenir un échec et mat. Construire physiquement Hive donne sinon l’occasion de tenter de beaux projets, notamment en utilisant du bois.
30 rails, une référence des roll and write dans un format idéal pour les phobiques du genre.
Quelques jeux de société habituellement physiques:
Onirim. Doit-on encore présenter Onirim ? Un grand classique des solitaires. Il faut y écumer un deck de rêves pour y forger des clefs des songes en tentant d’accumuler des cartes spécifiques à la suite sans trop souffrir d’infâmes cauchemars.
Shephy est un ovni au style naïf. Puzzle solitaire, il est pourtant brutalement difficile (au moins pour moi). L’objectif y est de compter jusqu’à 1000 moutons en combotant frénétiquement. Il fut un temps disponible en print and play mais semble dorénavant introuvable en papier.
Star realms et Ascension sont deux deck buildings, l’un spatial, l’autre magique, qui se disputent la palme de meilleur descendant de la génération fondatrice du genre. Si Dominion conservera indéfiniment sa place sur le trône, ces deux là jouent des coudes pour l’appellation de premier dauphin.
Fluxx, grand classique du chaos, est le petit cousin un peu plus méconnu (du moins en France) de Munchkin. Rien à voir en terme de déroulement de jeu mais la même ambition d’un bazar total et d’une partie résolument foutraque et hilarante. Le jeu se réinvente à chaque carte, parfois jusqu’à la nausée.
Il faut absolument que vous jouiez à Évolution un jour ou l’autre. Si le plaisir de la tablée disparait, la pertinence du jeu n’en demeure pas moins tandis que vos espèces évoluent entre vos doigts, tour à tour prédatrices ou caparaçonnées, immenses ou innombrables, affamées ou partageuses.
Onitama ressemble à un affrontement stratégique rangé similaire aux échecs. Ses spécificités sont encore à déterminer mais ses utilisateur·ices en sont pleinement satisfaits.
Yahtzee, Uno, Othello, Triomino, et j’en passe. Vous pourriez aussi jouer aux grands classiques familiaux mais pourquoi ne pas tenter encore plus classique? Une partie de Yoté ou une partie d’Hnefatafl viking, par exemple ? Une rare opportunité de découvrir le jeu de stratégie combinatoire abstrait norrois par exellence. Ou une partie de Fidchell, les echecs celtes ? Il n’est pas dit que vous trouviez un jour un·e adversaire au coin d’une rue. Peut-être une partie du jeu du Moulin, alors, dont on dit qu’il remonte jusqu’à la Rome antique ? Peut-on faire plus classique ? Irvin Finkel, conservateur au British Museum, me dit que oui tout en vous enjoignant à participer à une partie du Jeu royal d’Ur avec son indécrottable humour.
J’aurai bien fini en détaillant quelques bons emprunts à la pratique du jeu de société mais la liste est déjà longue et sa pertinence théorique bien fine. Je ne dirais donc pas que je trouve ces petits jeux gratuits purement dématérialisés intéressant: Card thief et Card crawl, Underhand, Chthulu realms, Bushido warband, Night of the full moon. Avec tout ça, en tout cas, plus de raisons de ne pas jouer à un jeu de société.
Et pour ceux et celles prêt·es à y laisser quelques deniers, les possibilités listées ici sont absolument immenses.
Crédit photo: le musée Grévin de Montréal !